Sécurité des smartphones : sommes-nous à l’abri ?
Les smartphones sont devenus bien plus que des outils de communication. Ils sont aujourd’hui les coffres-forts de nos vies numériques : photos de famille, accès bancaires, messages professionnels, identifiants, dossiers médicaux, applications sociales, notes personnelles, et bien plus encore. Pourtant, cette concentration d’informations sensibles fait de nos téléphones des cibles de choix pour les cybercriminels. En 2025, les menaces évoluent, se font plus discrètes, plus sournoises, et bien souvent, elles ne laissent aucun indice de leur présence.
Des rapports récents émanant d’agences de sécurité européennes et nord-américaines tirent la sonnette d’alarme : l’essor des attaques dites « zero-click », ne nécessitant aucune interaction de l’utilisateur, démontre à quel point nos téléphones peuvent être compromis sans même que nous en ayons conscience. Ces cyberattaques ne visent plus seulement les hauts responsables politiques ; elles s’attaquent aussi aux journalistes, aux chefs d’entreprises, et même à des particuliers sans motif apparent.
Peut-on vraiment pirater un smartphone ?
La réponse est sans équivoque : oui. Les smartphones, bien que dotés de systèmes de protection avancés, ne sont pas invulnérables. Les modes d’attaque ont gagné en sophistication. Le piratage classique, à base de phishing ou d’applications infectées, côtoie aujourd’hui des méthodes extrêmement complexes comme les failles « zero-day » non encore connues des constructeurs, permettant une intrusion sans clic de la victime.
Le tristement célèbre spyware Pegasus en est l’illustration la plus parlante. Capable d’accéder à la totalité d’un téléphone (messages, photos, microphone, caméra, appels, géolocalisation), il a été déployé par des États pour surveiller journalistes, avocats ou militants. Pire encore : il ne laisse aucune trace visible de son activité.
Au-delà de Pegasus, des malwares comme « BadBazaar », « Moonshine » ou « Hermit » ont ciblé de nombreux utilisateurs Android via des APK frauduleux, déguisés en applications légitimes. Ces logiciels peuvent accéder aux contacts, à l’historique d’appels, ou activer discrètement la caméra et le micro. Ils se propagent via des messages contenant des liens, des QR codes malveillants, ou encore des réseaux Wi-Fi piégés.
Faut-il un antivirus sur smartphone ?
La question revient souvent, et les avis sont partagés. Dans l’univers Android, les antivirus peuvent jouer un rôle utile, notamment pour les utilisateurs qui installent des APK hors du Play Store, utilisent des téléphones rootés, ou naviguent fréquemment sur des sites peu sûrs. Des logiciels comme Bitdefender, ESET ou Malwarebytes offrent des fonctionnalités intéressantes : détection proactive, scan régulier, protection web et même pare-feu.
Mais pour un utilisateur moyen, le recours à un antivirus tiers est moins essentiel si le smartphone reste dans son écosystème sécurisé, reçoit les mises à jour régulières, et si l’utilisateur se limite au Google Play Store. Google Play Protect assure déjà une sécurité raisonnable en scannant les applications et en détectant les comportements suspects.
Sous iOS, la question ne se pose quasiment pas. Le système très fermé d’Apple limite drastiquement les possibilités pour les antivirus d’intervenir. Apple mise sur la prévention : sandboxing, restrictions d’accès, mise à jour systématique et contrôle strict de l’App Store.
Mes données sont-elles en sécurité ?
Les systèmes modernes offrent un haut niveau de sécurité intrinsèque : chiffrement de bout en bout, authentification biométrique, cloisonnement des applications. Mais tout repose sur les paramètres choisis par l’utilisateur et la rigueur dans ses usages.
Les applications tierces, même lorsqu’elles paraissent sérieuses, peuvent exploiter de manière excessive les permissions : accès au micro, à la localisation, aux contacts. TikTok, Facebook ou même certaines apps préinstallées par les constructeurs sont régulièrement pointées du doigt pour la collecte massive de données.
Sur Android comme sur iOS, il est aujourd’hui possible de contrôler finement les autorisations, de restreindre l’accès au micro, à la caméra ou à la localisation, de gérer les activités en arrière-plan. Encore faut-il que l’utilisateur prenne le temps de le faire. Une vigilance permanente est nécessaire : lecture des conditions d’utilisation, vérification des paramètres de confidentialité, suppression des apps inutiles.
Peut-on activer la caméra à distance ?
Oui. Cette forme d’intrusion, surnommée « camfecting », permet à un pirate de prendre le contrôle de la caméra sans que l’utilisateur ne s’en rende compte. Cette technique repose souvent sur des failles logicielles ou des applications malveillantes qui obtiennent un accès prolongé au matériel.
Certaines versions d’Android anciennes sont particulièrement vulnérables, notamment lorsqu’elles ne reçoivent plus de mises à jour de sécurité. Le voyant de la caméra ne s’allume pas toujours, ce qui rend la détection difficile. Heureusement, les systèmes récents affichent une icône ou une notification lorsque la caméra ou le micro sont utilisés.
En activant l’option « indicateur de caméra/micro » dans les paramètres d’accessibilité, l’utilisateur peut détecter les accès intempestifs. L’installation d’un capuchon physique de caméra est aussi une mesure simple mais efficace.
Cas concrets de piratages et révélations publiques
Plusieurs affaires médiatisées ont révélé l’ampleur du problème. En France, plusieurs journalistes et membres de la société civile ont été ciblés par Pegasus. En Espagne, l’affaire « Catalangate » a démontré l’usage massif de logiciels espions pour surveiller des politiciens indépendantistes. Aux États-Unis, plusieurs dirigeants d’entreprises ont vu leurs iPhones compromis via des attaques zero-click sans même qu’ils ne reçoivent de message.
D’autres cas plus ordinaires touchent des particuliers : des caméras allumées sans consentement, des notifications fantômes, des applications fantômes qui apparaissent puis disparaissent, ou des textos envoyés automatiquement. Ces signaux doivent toujours alerter.
Android vs iOS : une sécurité équivalente ?
Android, avec sa fragmentation importante, présente un défi : tous les fabricants ne déploient pas les mises à jour au même rythme. Certains modèles n’ont plus de patchs de sécurité après deux ans. Les utilisateurs ne s’en rendent pas toujours compte et continuent à utiliser un système exposé.
iOS, plus fermé, applique les mises à jour en temps réel sur presque tous les appareils compatibles, ce qui lui confère une longueur d’avance en termes de correctifs. Cependant, la centralisation des données et le verrouillage du système peuvent aussi rendre la détection des anomalies plus difficile pour un utilisateur averti.
Les deux systèmes intègrent aujourd’hui des protections solides : sandboxing, autorisations détaillées, chiffrement par défaut, alerte sur les comportements suspects. Mais la sécurité repose toujours sur une chaîne dont l’humain est souvent le maillon faible.
Le rôle des mises à jour de sécurité
Les correctifs de sécurité sont essentiels. Ils bouchent les failles découvertes après coup, qu’elles aient été exploitées ou non. Chaque mois, Android publie un bulletin de sécurité recensant les vulnérabilités corrigées. Apple agit de manière plus discrète, mais tout aussi efficace.
Ne pas mettre à jour son téléphone revient à laisser une porte ouverte. Il est crucial d’activer les mises à jour automatiques, de redémarrer régulièrement l’appareil, et de surveiller les annonces de sécurité concernant les applications sensibles comme les navigateurs, messageries, apps bancaires.
Conseils pratiques pour protéger son smartphone
La meilleure défense reste l’éducation numérique. Il faut apprendre à repérer les signes avant-coureurs : surconsommation de batterie, surchauffe anormale, trafic réseau suspect. Il est également conseillé de :
- Ne jamais rooter ni jailbreaker son téléphone sauf usage expert;
- Ne pas installer d’applications en dehors des stores officiels;
- Contrôler les permissions tous les trimestres;
- Utiliser une authentification à double facteur dès que possible;
- Supprimer les applications inutilisées;
- Sécuriser l’accès avec un code robuste, et non un simple schéma ou 1234.
Mythes courants autour de la sécurité mobile
Ne pas éteindre son téléphone ne le protège pas forcément : certains logiciels espions peuvent se cacher dans le firmware et survivre à un redémarrage. Non, installer un antivirus ne garantit pas une protection absolue. Non, un iPhone n’est pas inviolable, comme le montrent les attaques Pegasus.
Autre mythe : utiliser le mode avion ne coupe pas toujours toutes les connexions, surtout sur des téléphones trafiqués. Enfin, se fier uniquement au voyant de caméra est illusoire : un logiciel bien conçu peut capturer sans l’activer.
Vers quelle cybersécurité mobile en 2030 ?
L’avenir s’annonce à la fois plus sûr et plus complexe. L’intelligence artificielle va renforcer les protections en détectant les comportements suspects en temps réel. Les smartphones intégreront de nouveaux capteurs pour détecter des intrusions physiques ou logicielles.
La reconnaissance faciale et biométrique sera améliorée, mais soulèvera de nouvelles questions sur la souveraineté numérique. Certains pays plaident pour des OS souverains, afin d’éviter la dépendance aux géants américains ou chinois. Les débats sur l’anonymat, la vie privée et la surveillance d’État vont encore s’intensifier.

Tableau récapitulatif des menaces et protections
Type de menace | Mode d’action | Symptômes éventuels | Protection recommandée |
---|---|---|---|
Zero-click / Pegasus | Infection silencieuse via faille système | Aucun symptôme visible | Mises à jour immédiates, OS récent, ne pas jailbreaker/rooter |
Malware APK / faux QR code | Application malveillante déguisée ou lien piégé via SMS/mél | Batterie qui chauffe, ralentissements, données en chute | Installer uniquement depuis stores officiels, vérifier permissions |
Espionnage micro/caméra | Camfecting ou accès furtif via app autorisée | Icône de micro active, sons en arrière-plan | Contrôler les accès régulièrement, capuchon de caméra, indicateur système |
Collecte excessive de données | Applications abusant des permissions | Publicités ciblées, consommation élevée | Gérer finement les permissions, utiliser les paramètres de confidentialité |
Firmware infecté | Infection installée en usine ou via mise à jour falsifiée | Aucun ou comportement anormal persistant | Acheter chez un revendeur fiable, éviter les ROMs non officielles |
Que retenir ?
La sécurité de nos smartphones n’est pas une illusion, mais elle n’est jamais acquise. Les menaces sont réelles, présentes, et parfois invisibles. Les constructeurs et éditeurs de logiciels multiplient les efforts pour proposer des systèmes robustes. Mais aucune technologie, aussi performante soit-elle, ne saurait remplacer le bon sens, la prudence et la mise à jour régulière. En matière de cybersécurité mobile, la vigilance reste la meilleure arme. Et chacun, à son échelle, peut contribuer à ne pas devenir la prochaine victime silencieuse de la guerre numérique moderne.
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