French Days
Depuis plusieurs années, la France a choisi de se doter d’un événement commercial qui puisse rivaliser avec les grandes opérations internationales dominées par les géants du e-commerce. Cet événement, ce sont les French Days, présentés dès leur création en 2018 comme le « Black Friday à la française ». Leur ambition est simple : proposer aux consommateurs de l’Hexagone une période de promotions fortes, inspirée des modèles venus des États-Unis et de Chine, mais en mettant en avant les enseignes nationales et une consommation davantage recentrée sur le marché local.
Pourtant, derrière les slogans et les campagnes marketing, se pose une question essentielle : les French Days sont-ils une véritable alternative au Black Friday américain et au Singles’ Day chinois, ou bien s’agit-il d’une simple opération opportuniste sans réelle identité ?
Pour répondre à cette interrogation, il faut revenir sur l’histoire de leur création, comprendre leur fonctionnement, analyser leur calendrier, observer les acteurs impliqués, et surtout comparer leur impact économique et culturel avec les mastodontes que sont leurs équivalents étrangers.
La naissance des French Days s’inscrit dans un contexte bien particulier. Dès le début des années 2010, le Black Friday a commencé à s’imposer en France, porté par les campagnes massives de sites comme Amazon, mais aussi par les enseignes internationales présentes dans l’Hexagone. À la même époque, le Singles’ Day chinois, organisé chaque 11 novembre par le groupe Alibaba, battait tous les records mondiaux de ventes en ligne, dépassant en un seul jour ce que certaines grandes puissances commerciales réalisaient en plusieurs mois.
Les enseignes françaises, bien conscientes de cette nouvelle concurrence, ont rapidement compris que leurs clients se tournaient de plus en plus vers ces événements étrangers, souvent perçus comme plus attractifs. Pour ne pas rester spectateurs, six grands noms du commerce français ont décidé de réagir : Cdiscount, La Redoute, Boulanger, Rue du Commerce, Fnac-Darty et Showroomprivé. Ces acteurs ont imaginé ensemble un événement national qui permettrait de canaliser l’appétit croissant des consommateurs pour les promotions massives, mais cette fois-ci avec une coloration tricolore.
Leur objectif initial était double. D’abord, il s’agissait de rééquilibrer la concurrence en offrant une alternative crédible aux mastodontes internationaux, en particulier Amazon et Alibaba. Ensuite, il fallait stimuler la consommation sur des périodes jugées creuses pour le commerce, notamment au printemps et à l’automne, en dehors des traditionnelles soldes d’hiver et d’été.
Derrière l’aspect purement commercial, l’initiative portait aussi un message politique et économique : celui de défendre le commerce français, qu’il soit incarné par des enseignes nationales, des marques locales ou des petites et moyennes entreprises bénéficiant d’une visibilité accrue grâce à ces journées de rabais.
Contrairement aux soldes encadrés par la loi, les French Days sont une opération promotionnelle libre, sans contrainte réglementaire particulière. Les enseignes fixent elles-mêmes leurs niveaux de réduction et la durée de leurs offres, tout en respectant évidemment les règles générales de transparence tarifaire.
La période choisie est relativement courte, puisque l’événement s’étend généralement sur cinq à six jours consécutifs. Pendant ce laps de temps, les sites marchands et les magasins participants mettent en avant des promotions fortes, souvent comprises entre 20 % et 50 %, mais pouvant dans certains cas dépasser ces niveaux. Les secteurs les plus représentés sont le high-tech, l’électroménager, la mode, la maison et décoration, ainsi que les voyages et loisirs.
Le succès repose en grande partie sur la mise en scène numérique : pages dédiées sur les sites marchands, bannières promotionnelles, campagnes d’e-mails, notifications mobiles et relais sur les réseaux sociaux. Tout est fait pour capter l’attention du consommateur dans un temps limité, avec l’idée que l’urgence et la rareté déclenchent l’acte d’achat.
Il existe aussi une dimension d’exclusivité. Certaines enseignes utilisent les French Days pour lancer des offres réservées à leurs clients fidèles, pour écouler des stocks dormants, ou encore pour mettre en avant leurs propres marques. Ainsi, au-delà du simple déstockage, l’événement devient aussi une vitrine stratégique.
L’un des atouts majeurs des French Days réside dans leur positionnement dans le calendrier commercial. Alors que le Black Friday est toujours fixé au lendemain de Thanksgiving (soit fin novembre), et que le Singles’ Day se déroule le 11 novembre, les French Days sont organisés à deux moments clés :
Ce double rendez-vous offre aux consommateurs deux opportunités distinctes pour réaliser des affaires, et aux enseignes deux pics d’activité supplémentaires en dehors des périodes traditionnelles de soldes.
Au départ, les French Days étaient limités aux six enseignes fondatrices, mais l’événement s’est progressivement élargi à un grand nombre d’acteurs. Aujourd’hui, on y retrouve aussi bien les grands noms du commerce en ligne que des distributeurs physiques, ainsi que de nombreuses marques françaises et internationales qui profitent de l’occasion pour proposer des promotions ciblées.
Ce qui rend les French Days particulièrement intéressants, c’est la diversité des participants. On y croise des géants comme Fnac-Darty et Boulanger, spécialisés dans le high-tech et l’électroménager, mais aussi des enseignes plus orientées vers la mode ou l’ameublement, comme La Redoute ou Maisons du Monde. Des distributeurs sportifs tels que Décathlon ou encore des sites spécialisés dans le voyage participent également à l’opération.
Cette multiplicité des acteurs donne une envergure nationale à l’événement, bien que celui-ci n’atteigne pas encore l’ampleur médiatique et commerciale de ses concurrents étrangers.
Pour évaluer la pertinence des French Days, il est indispensable de les comparer avec leurs équivalents internationaux. Le tableau ci-dessous permet de résumer les principales caractéristiques :
Critère | French Days | Black Friday | Singles’ Day (11/11) |
---|---|---|---|
Origine | France (2018) | États-Unis (années 1960, popularisé dans les années 2000 en Europe) | Chine (2009, Alibaba) |
Fréquence | Deux fois par an (printemps et automne) | Une fois par an (fin novembre) | Une fois par an (11 novembre) |
Durée | 5-6 jours | 1 jour (étendu souvent sur une semaine) | 1 jour (avec prolongements) |
Acteurs principaux | Enseignes françaises (Cdiscount, Fnac-Darty, La Redoute…) | Géants mondiaux (Amazon, Walmart, Apple, etc.) | Alibaba et son écosystème (Tmall, Taobao, AliExpress) |
Secteurs dominants | High-tech, électroménager, mode, maison, voyages | High-tech, mode, jouets, électroménager, automobile | Mode, high-tech, beauté, alimentation, services |
Impact économique (France) | Quelques centaines de millions d’euros | Plusieurs milliards d’euros | Plus de 70 milliards de dollars en 24 h (record 2020) |
Positionnement | Alternative nationale, soutien au commerce local | Événement mondial de consommation | Mastodonte du e-commerce mondial, surtout en Asie |
La comparaison montre bien que les French Days n’ont pas encore l’envergure de leurs rivaux internationaux. En termes de volumes d’affaires, l’écart est considérable : le Black Friday génère des milliards d’euros de ventes rien qu’en France, tandis que le Singles’ Day dépasse les dizaines de milliards de dollars au niveau mondial. Les French Days, eux, restent plus modestes, bien que leur croissance soit constante depuis leur création.
Cependant, il serait injuste de juger leur pertinence uniquement par le prisme des chiffres. Leur force est ailleurs. Ils offrent aux consommateurs une alternative locale, souvent perçue comme plus éthique ou plus responsable, même si cette image reste discutable au vu de l’intensité des promotions. Ils permettent aussi aux enseignes françaises de garder la main sur une partie des achats massifs déclenchés par les opérations internationales.
Enfin, leur calendrier spécifique en fait une arme stratégique, puisque les éditions de printemps et d’automne complètent habilement les cycles traditionnels de consommation.
Pour continuer à exister face à la puissance écrasante du Black Friday et du Singles’ Day, les French Days devront relever plusieurs défis. Le premier est celui de la crédibilité des réductions : les consommateurs, de plus en plus avertis, savent repérer les fausses promotions, et les enseignes devront garantir la sincérité de leurs rabais pour conserver la confiance du public.
Le second défi est celui de la différenciation. Si les French Days se contentent d’être une pâle copie du Black Friday, ils risquent de perdre en intérêt. Pour séduire durablement, ils devront affirmer une identité propre, par exemple en mettant davantage en avant les produits français, les jeunes marques, ou encore les initiatives durables.
Enfin, leur avenir dépendra aussi de leur capacité à s’imposer dans le paysage médiatique. Aujourd’hui encore, leur notoriété reste moindre que celle du Black Friday, massivement relayé dans les médias et sur les réseaux sociaux.
Les French Days représentent une initiative intéressante, à la fois économique et symbolique. Ils montrent que la France n’a pas voulu rester à la traîne face à l’américanisation et à la sinisation du commerce mondial, et qu’elle a su inventer un format propre, adapté à ses réalités locales.
Cependant, ils restent pour l’instant une alternative partielle, plus complémentaire que concurrente des géants mondiaux. Leur valeur ajoutée réside dans leur ancrage national, dans leur double temporalité et dans leur rôle de soutien au commerce français. Pour devenir une véritable référence internationale, ils devront encore gagner en puissance, en visibilité et en singularité.
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