Console portable rétro
Depuis quelques années, un nouveau phénomène envahit les plateformes de vente en ligne comme AliExpress, Temu ou Geekbuying : les consoles portables chinoises rétro. Souvent proposées entre 30 et 150 euros, elles promettent de faire revivre l’âge d’or du jeu vidéo avec des titres cultes comme Street Fighter II, Super Mario World, Sonic the Hedgehog, Tetris ou Metal Slug.
Elles se présentent sous un design compact, parfois inspiré des Game Boy, PSP ou Nintendo DS, et affichent des milliers de jeux préinstallés. Mais derrière cette promesse de nostalgie à petit prix se cache une question essentielle : s’agit-il vraiment des vrais jeux, et surtout, est-ce légal ?
Plongeons dans les entrailles de ce phénomène digital fascinant, entre passion du rétro-gaming, prouesses techniques et zones d’ombre juridiques.
Depuis le début des années 2010, le rétro-gaming connaît un renouveau spectaculaire. Les joueurs d’aujourd’hui sont souvent les enfants des années 80 et 90, nostalgiques des consoles de leur enfance : NES, Super Nintendo, Mega Drive, Game Boy ou Neo Geo.
Les fabricants officiels, comme Nintendo ou Sega, ont bien compris ce filon. Ils ont lancé des consoles miniatures officielles — la NES Mini, la Mega Drive Mini, la PlayStation Classic — qui reproduisent fidèlement l’expérience de jeu d’époque.
Mais très vite, un marché parallèle a explosé sur les sites chinois : des consoles fabriquées par des marques peu connues, souvent basées à Shenzhen, qui promettent la même expérience… pour une fraction du prix. Ces appareils séduisent des millions de joueurs dans le monde entier grâce à leur accessibilité et à leur apparente richesse de contenu.
Lorsqu’on achète une console portable rétro sur un site chinois, la description annonce souvent entre 5 000 et 10 000 jeux intégrés. Le design évoque tantôt la Nintendo Switch, tantôt la PSP, parfois même la Game Boy Advance. Les écrans sont LCD, tactiles ou non, et les menus affichent des icônes familières : Mario, Sonic, Donkey Kong, Street Fighter ou Contra.
En réalité, la majorité de ces consoles ne sont pas des produits sous licence officielle. Elles sont produites par des marques comme Anbernic, Powkiddy, Retroid, Miyoo ou GPD. Certaines d’entre elles sont devenues célèbres auprès des amateurs de rétro-gaming pour la qualité de leur matériel et leur compatibilité logicielle.
Mais la véritable question réside dans leur contenu : ces milliers de jeux préinstallés sont-ils authentiques ?
Techniquement, ces consoles ne contiennent pas les jeux originaux. Elles fonctionnent grâce à des émulateurs, c’est-à-dire des logiciels capables de reproduire le fonctionnement des anciennes consoles (NES, SNES, PlayStation 1, Arcade MAME, etc.) sur un matériel moderne.
L’émulation, en soi, n’est pas illégale. Elle repose sur un principe de rétro-ingénierie et permet de préserver des jeux anciens, parfois disparus. Des projets comme RetroArch, Dolphin ou PCSX2 sont parfaitement légaux tant qu’ils ne contiennent pas de jeux sous copyright.
Mais là où la frontière devient floue, c’est lorsque les jeux eux-mêmes — les fameuses ROMs ou ISO — sont inclus sans l’autorisation des ayants droit. Et c’est exactement ce que font la plupart des consoles chinoises.
Quand tu lances Street Fighter II ou Super Mario Bros sur une de ces consoles, tu joues bien à la version originale du jeu, mais copiée à partir d’une ROM extraite illégalement d’une cartouche ou d’un CD d’époque. Autrement dit : le code du jeu est authentique, mais son usage ne l’est pas.
C’est un peu comme écouter un album MP3 téléchargé illégalement : la musique est vraie, mais l’obtention du fichier n’est pas légale.
Certaines consoles se défendent en expliquant que leurs ROMs sont « disponibles librement sur internet » ou « destinées à la préservation du patrimoine vidéoludique ». En réalité, seuls les jeux tombés dans le domaine public ou distribués par leurs auteurs sous licence libre peuvent être légalement intégrés. Et cela représente une infime partie de leur catalogue.
En théorie, la législation est claire : les jeux vidéo sont protégés par le droit d’auteur, exactement comme les films, la musique ou les livres. Télécharger, distribuer ou vendre un jeu sans autorisation est une infraction.
Cependant, la pratique est plus nuancée. Les fabricants de consoles rétro chinoises opèrent souvent dans une zone grise, profitant de la difficulté pour les ayants droit d’intenter des actions internationales. Les jeux préinstallés sont hébergés sur des serveurs étrangers, et les revendeurs occidentaux jouent parfois sur la méconnaissance des acheteurs.
Pour l’utilisateur final, le risque de sanction est faible, mais pas nul. Ce n’est pas illégal d’acheter une console vide d’émulateurs, mais c’est illégal d’utiliser ou de revendre une console contenant des jeux sous copyright.
Ce qui surprend dans ce marché, c’est la qualité grandissante du matériel. Beaucoup de ces consoles embarquent des processeurs ARM puissants, des écrans IPS haute résolution, une compatibilité HDMI, et même des systèmes Linux personnalisés. Certaines, comme les modèles d’Anbernic ou de Retroid, sont reconnues pour leur stabilité et leur ergonomie.
Des communautés de passionnés les achètent non pas pour les jeux illégaux, mais pour installer leurs propres ROMs légitimes ou utiliser des systèmes d’émulation open source. Ces consoles deviennent alors des outils de préservation culturelle, capables de faire tourner d’anciens jeux disparus, à condition d’utiliser des copies personnelles.
Modèle | Prix moyen | Émulateurs pris en charge | Jeux préinstallés | Légalité du contenu | Points forts | Points faibles |
---|---|---|---|---|---|---|
Anbernic RG35XX | 80 € | NES, SNES, GBA, PS1 | Oui (non officiels) | Non | Excellente qualité, écran IPS | Jeux non licenciés |
Powkiddy RGB20S | 60 € | Arcade, Mega Drive, GBA | Oui (ROMs incluses) | Non | Prix attractif | Menu parfois instable |
Retroid Pocket 4 | 150 € | Jusqu’à Dreamcast, PSP | Optionnel | Oui (si vide) | Très fluide, matériaux premium | Complexe à configurer |
Miyoo Mini Plus | 70 € | NES, SNES, GBC, PS1 | Oui (préchargés) | Non | Format compact, communauté active | Contenu illégal par défaut |
GPD Win Mini | 400 € | PC, consoles modernes | Aucun | Oui | Machine de jeu complète | Prix élevé |
Face à l’essor des consoles pirates, les éditeurs historiques ont réagi. Nintendo propose depuis plusieurs années un catalogue rétro via son service Switch Online, qui permet de rejouer légalement à des titres NES, SNES, N64 ou Game Boy. Sega et Sony ont adopté des démarches similaires, intégrant des classiques à leurs services en ligne.
Les constructeurs ont compris que les joueurs étaient prêts à payer pour la nostalgie, à condition que l’expérience soit fidèle et légale. Le défi reste cependant le prix : une console chinoise à 60 € qui émule 5 000 jeux reste beaucoup plus séduisante qu’un abonnement mensuel pour 30 titres officiels.
Si ces consoles chinoises rencontrent un tel succès, c’est parce qu’elles conjuguent prix, simplicité et nostalgie immédiate. Il suffit de les allumer pour retrouver les sensations d’enfance, sans installation, sans connexion, sans publicité.
Elles touchent une fibre émotionnelle profonde : celle du jeu d’avant, accessible et sans contrainte. Dans un monde numérique saturé d’achats intégrés et de mises à jour, ces petits appareils offrent une parenthèse d’authenticité, même si elle repose sur un flou juridique.
Le futur du rétro-gaming pourrait bien se jouer sur un équilibre entre liberté et légalité. L’émulation restera un pilier pour préserver les œuvres vidéoludiques anciennes, mais les éditeurs devront trouver des modèles plus ouverts et abordables pour ne pas laisser le marché aux acteurs non officiels.
On voit déjà émerger des plateformes hybrides où les créateurs indépendants proposent des remakes légaux de jeux d’époque, ou des consoles open source livrées sans contenu mais prêtes à accueillir des ROMs libres.
À long terme, la nostalgie numérique pourrait devenir un marché à part entière, mais encadré, où la mémoire du jeu vidéo serait valorisée sans pour autant contourner le droit d’auteur.
Les consoles portables chinoises à bas prix offrent une expérience indéniablement séduisante : retrouver Street Fighter, Zelda ou Sonic dans la paume de sa main, c’est un plaisir universel. Mais il faut être lucide : la plupart de ces appareils utilisent des copies illégales de jeux protégés.
Les jeux sont « vrais » dans leur code, mais « faux » dans leur provenance.
La légalité dépendra donc non pas du matériel lui-même, mais de ce qu’on en fait.
Le vrai enjeu, aujourd’hui, est de concilier la passion du rétro-gaming avec le respect du travail des créateurs. Les consoles chinoises ont réveillé notre nostalgie, mais c’est à l’industrie de transformer ce désir en une offre légale, accessible et durable.
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